Elseddik Haftar rejette la normalisation avec Israël

La révélation de la rencontre entre le ministre israélien des Affaires étrangères Eli Cohen et son homologue libyenne Najla al-Manqoush, qui s’est déroulée en Italie, a rouvert le débat public sur les positions des partis politiques libyens concernant le dossier de la normalisation avec l’État hébreu.
À la suite de cette divulgation, des manifestations spontanées ont eu lieu dans de nombreuses villes libyennes, certains contestataires brûlant le drapeau israélien. Et sur les réseaux sociaux, des internautes ont exprimé leur colère en condamnant “l’acte de trahison” commis, selon eux, par Mme al-Manqoush. Cela au moment même de l’annonce de l’arrestation de la ministre du gouvernement Dbeïba, qui été renvoyée devant le parquet pour enquête.
L’une des plus intransigeantes positions sur ce dossier de la normalisation avec Israël est celle du Dr Elseddik Haftar – fils aîné du maréchal Khalifa Haftar, commandant en chef de l’Armée nationale libyenne (ANL) –, qui rejette catégoriquement tout compromis au détriment des droits du peuple palestinien et, plus généralement, des peuples arabes. Eli Cohen, lui-même, a souligné dans un tweet l’échec de toutes les tentatives israéliennes pour rentrer en contact avec Elseddik Haftar. Les prises de position de ce dernier reflètent l’opinion de l’immense majorité du peuple en Libye : selon un récent sondage* mené par le Centre arabe de Recherches et d’Études politiques, basé à Doha (Qatar), 96% des Libyens rejettent la normalisation des relations avec Israël ainsi que sa reconnaissance.
La Libye s’est classée au 2e rang des 14 pays arabes prospectés afin d’évaluer leur niveau d’opposition à cette normalisation. L’une des études a mis en garde contre la potentielle détérioration de la situation sécuritaire en Libye si des responsables, qu’ils soient de l’Est ou de l’Ouest du pays, tentent de normaliser les relations avec l’État hébreu. Ce sondage a conclu que la normalisation avec Israël serait une grave menace pour la stabilité libyenne. Par le passé, sur la base de cette étude, certaines forces présentes sur le terrain libyen se sont mutuellement accusées de chercher à normaliser les relations avec l’État hébreu à la demande expresse des États-Unis.
La réunion controversée entre les chefs israélien et libyenne de la diplomatie a été dévoilée par les médias hébreux. Ils ont ainsi rapporté qu’Eli Cohen avait “secrètement rencontré” Najla al-Manqoush lors d’une démarche inédite visant à discuter des relations bilatérales entre leurs deux pays. “Cette entrevue était la toute première jamais effectuée entre les ministres des Affaires étrangères d’Israël et de Libye. Elle avait pour but de discuter des possibilités de coopération et de correspondance entre les deux parties, ainsi que deviser des moyens de préserver le patrimoine des juifs libyens”, a indiqué la chaîne télévisée israélienne Channel 12, qui a précisé “qu’Eli Cohen a rencontré (…) Najla Al-Manqoush en Italie, lors de la réception de cette dernière par son homologue italien Antonio Tajani”. Au cours de ces discussions, Eli Cohen a argué du fait que “la dimension de la Libye ainsi que sa localisation stratégique confèrent aux relations bilatérales une importance considérable et un prodigieux potentiel”. Le ministre israélien des Affaires étrangères a en outre confié avoir dialogué avec son homologue libyenne du “grand bénéfice qu’offriraient des relations diplomatiques israélo-libyennes, ainsi que de l’importance de préserver le patrimoine des juifs de Libye”, y compris la réhabilitation des synagogues et des cimetières juifs.
Toutefois, après les violentes protestations en Libye, les médias israéliens ont inversé la vapeur, faisant arrière-toute sur cette affaire. Dans le même temps, Ofir Gendelman, ancien porte-parole du Premier ministre israélien auprès de la presse arabe, a supprimé son tweet dans lequel il commentait la rencontre des deux ministres. Gendelman avait écrit : “La réunion de Cohen en Italie avec al-Manqoush a été déclassifiée.” Il l’a également qualifiée “d’historique”. “L’établissement d’une coopération entre les deux pays a été discuté”, avait-il ajouté, notant qu’il s’agissait “de la première étape pour l’instauration de relations officielles entre les deux pays” et que “le cercle régional de la paix s’élargit”.
L’approche du Dr Elseddik Haftar concernant cette question sensible est également conforme à la législation libyenne, qui impose des sanctions en cas de normalisation avec “l’ennemi sioniste usurpant les terres arabes” et pénalise la communication avec Israël sous quelque forme que ce soit – directe ou indirecte, ouverte ou secrète – ; notamment les lois n° 62 de 1957 et n° 7 de 1962. De fait, la loi n° 62 interdit à toute personne physique ou morale de conclure un accord de quelque nature que ce soit avec des organismes ou des personnes basés ou résidant en Israël, qui en sont ressortissants, qui travaillent pour l’État hébreu ou avec ses représentants. Quiconque viole ces proscriptions est passible d’une peine d’emprisonnement de trois à dix ans, une condamnation qui peut également être accompagnée d’une forte amende.

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* Les résultats de l’enquête ont été publiés le 4 janvier 2023 et concernaient 33 300 sondés avec lesquels des entretiens personnels ont été menés directement. Quelque 945 chercheurs et chercheuses ont pris part à sa réalisation, qui a nécessité plus de 72 mille heures.

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